Le mandat d’Alpha Condé à la tete de l’Union Africaine : un bilan mitigé
Jusqu’à la découverte du commmerce des Noirs sub-sahariens en Libye par la chaîne américaine CNN .Les choses allaient un peu bien, pour la présidence du président Alpha Condé, à l’Union Africaine. Mais à quelques jours de la fin de son mandat, le 31 décembre prochain, sa présidence est ternie par ce documentaire montrant un traitement inhumain des Africains dans le monde arabe, présisement , en Libye. Cette découverte devient une humiliation infligée au président en exercice, mais aussi pour toute l’afrique, et particulièrement ses dirigeants corrompus, et impuissants à défendre, pour les intérêt ,minimaux de leurs nations respectives.
Interrogé sur ces images, Alpha Condé dit d’abord, « ne pouvoir commenter, car étant en voyage et d’ajouter plus tard qu’il allait convoquer une réunion du comité exécutif de son organisme ». Mais Alpa Condé n’avait parlé ni d’isolement ou d’exclusion de la Libye, ni d’aucune possible sanction encore moins de crimes contre l’humanité. Aucune position réelle affichée.
Surpris à son établissement préféré parisien, l’hôtel Raphaël, par une foule d’Africains et d’Antillais, tous révoltés par ces révélations, il s’est vite rendu compte de la gravité du problème. La foule qui avait encerclé le palace, scandait alors : « Alpha sors ! » Pour calmer le jeu, il a reçu immédiatement les représentants de cette foule en colère contre la barbarie dont subissent les Africains en Libye.
Le chef de l’État guinéen et tous ses pairs venaient une fois de plus de faillir à leurs devoirs de protéger leurs citoyens.
En ce qui concerne sa présidence au sein de l’Union Africaine, d’une durée d’un an, l’échec s’annonçait déjà à grands pas, vu les proportions de la crise. Et pourtant, tout avait presque bien commencé pour lui, au début de son mandat, avec une bonne résolution du conflit en Gambie.
Grâce à son conseiller Tibou Camara, beau-frère du président gambien et aux pressions du président Buhari du Nigeria, Yaya Jammeh avait accepté d’abandonner le pouvoir et prendre le chemin de l’exil en Guinée Équatoriale, Afrique Centrale.
Une fois ce conflit en Gambie résolu, le président Alpha Condé s’était mis dans une posture de médiateur international. À cet effet, il a proposé ses services de médiation dans la résolution de la récente crise entre l’Arabie Saoudite et le Koweït, au-delà de l’Afrique, alors que de nombreux conflits, demeuraient non résolus (crise au Mali, en Centrafrique, menaces djihadistes, crise de l’endettement, mais aussi la crise migratoire, totalement ignorée).
De Paris à Washington en passant par Pékin, Berlin, Hambourg, il enchaîne des rencontres, dont les succès, sont encore à démontrer et pour le continent africain dans son ensemble et pour la Guinée.
Pour la présidence guinéenne de l’Union Africaine, les diplomates guinéens étaient très mal préparés, à l’accompagner.
Leur pays qui n’avait jamais accédé à cette présidence, depuis 1963 (avec la création de l’OUA – organisation de l’unité africaine), allait enfin assumer la présidence tournante que d’autres pays avaient assurés à 2 ou 3 reprises.
Après son élection donc à ce poste, de grandioses manifestations sont organisées pour accueillir en fanfare, au bercail celui qui avait occupé le poste qui avait échappé, même Ahmed Sékou Touré, le premier président guinéen. Ce dernier avait pourtant été membre – fondateur de l’organisation panafricaine et champion de la décolonisation en Afrique.
Avec Telly Diallo, comme, premier secrétaire général, la diplomatie guinéenne avait été très active et très efficace sur le terrain de la décolonisation.
Pour le président Alpha Condé, assumer la présidence d’une telle organisation, représentait la réalisation d’un rêve qui remontait à de nombreuses années. Était-il prêt à bien assumer la fonction avec ses diplomates ? Pas très sûr.
Au ministère des Affaires étrangères ainsi qu’au département de la coopération internationale, il n’y avait aucune stratégie élaborée, aucune feuille de route. Le gros du travail avait été laissé à l’ambassade, à Addis-Abeba et sans aucune coordination avec le département de tutelle pour faire profiter la Guinée au maximum, tout en assurant sa bonne image de marque.
Un exemple pour illustrer cela s’est produit durant la présidence allemande du G-20, à Hambourg cette année où le président Alpha Condé était invité, comme porte-voix de l’Afrique.
La chancelière allemande, Angela Merkel, avait dans son agenda « Compact With Africa » de faire profiter, la jeunesse africaine de l’expérience de son pays, dans la formation professionnelle. Il revenait à chaque pays de monter des projets, choisir les lieux et autres modalités.
La Tunisie a courtisé le président guinéen, pour pousser le programme et s’est battue pour obtenir sa part de gâteau dans les 300 millions d’Euros. Le Sénégal et la Côte-d’Ivoire, ont, eux-aussi obtenu cette assistance pour la formation professionnelle de leurs jeunes.
Habituellement, un président en exercice, profite de son passage pour faire passer son agenda, les intérêts de l’Afrique, mais aussi ceux de son pays.
Un autre domaine où le président guinéen pouvait mieux faire, est la promotion de cadres de son pays, très peu représentés même à l’Union Africaine. Dans ce domaine aussi, on ne peut parler de progrès.
Quelques mois après le début de sa présidence à la tête de l’Union Africaine, le président limogea, son ministre des Affaires étrangères Makalé Camara pour des raisons politiques, dit-on.
Au même moment, les États-Unis, annoncent la suspension de visas pour trois pays qu’ils considéraient, comme récalcitrants dans la reprise de leurs ressortissants, ayant commis des délits, sur leur sol.
Cette décision américaine le laisse avec aucun pouvoir de négociation et prouve à quel degré d’estime et de considération, il est pris, comme le représentant de tout un continent.
Quelques jours après l’éclatement de la question d’esclavagiste en Libye, l’armée Zimbabwéenne dépose Robert Mugabe, qui a dirigé le Zimbabwe, depuis plus de 37 ans.
L’Union Africaine n’était pas très bien préparée. L’on se contente d’une déclaration, condamnant le coup en demandant le respect de la constitution.
Paul Kagamé, le successeur d’Alpha Condé, est-il un espoir pour l’Afrique ?
Dans une Afrique divisée en Anglophones et Francophones où les dirigeants francophones ont de la misère à se faire entendre, Alpha Condé ne pouvait échapper à la règle.
Déficient en anglais comme outil de travail de diplomates chevronnés, il était très limité, malgré toutes les connections qu’il a dans le monde.
Son successeur Paul Kagamé qu’il a souvent consulté durant son mandat, demeure le seul espoir de tout un continent.
Avant même de prendre le relais en janvier 2018, n’avait-il pas supprimé les visas pour tous les Africains, n’avait il pas décidé d’accueillir 30.000 migrants de Libye ? N’avait-il pas proposé des réformes pour sortir l’Union Africaine de sa lourdeur bureaucratique ?
Nul ne semble mieux préparé que le président rwandais à assumer cette fonction. Il a fait les preuves au Rwanda et vient avec une stratégie et une vision.
Pour le président guinéen, l’histoire ne retiendra que le manque de leadership au sommet de son institution, à chaque fois que l’on pensera aux images de CNN en Libye.